[Edito] Campagne en crypto, crypto en campagne
Longtemps associées au blanchiment d’argent et à une menace pour l’environnement, les cryptomonnaies ne semblent pas être l’outil idéal de financement d’une campagne électorale. Pourtant, les cryptomonnaies sont en train de devenir non seulement un outil de financement des campagnes électorales, mais aussi un enjeu de campagne.
La crypto comme outil de financement
Le financement de campagnes politiques via les cryptomonnaies est déjà une réalité. Aux États-Unis, Donald Trump a reçu des dons significatifs en bitcoins de la part des frères Winklevoss, fondateurs de la plateforme Gemini. Son équipe de campagne accepte déjà les cryptomonnaies ; celle de Biden/Harris envisagerait quant à elle de suivre le mouvement en collaborant avec Coinbase.
En France, la situation est plus compliquée en raison des règles strictes qui encadrent le financement des partis politiques :
- pour les personnes morales, interdiction des dons,
- pour les personnes physiques :
- jusqu’à 150 €, possibilité de faire un don en espèces ou en crypto,
- jusqu’à 7 500 € par an et par personnes, possibilité de faire un don à condition que celui-ci soit réalisé « par chèque, virement, prélèvement automatique ou carte bancaire ».
Ainsi, en 2014, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) avait rappelé que les dons en cryptomonnaies étaient prohibés. En dix ans, l’industrie s’est considérablement professionnalisée et est désormais régulée. Le réseau de prestataires de services sur actifs numériques (PSAN) capables de collecter et de transmettre l’identité des donateurs, et de convertir le don en cryptomonnaies en euros, apparaît ainsi de nature à dépasser les obstacles identifiés en 2014 par la CNCCFP (anonymat, traçabilité).
La crypto comme enjeu de campagne électorale
Au-delà du financement, les cryptomonnaies deviennent elles-mêmes un sujet de campagne. Avec 12 % des Français possédant des cryptos, les positions des candidats sur ce thème peuvent influencer une partie de l’électorat. Aux États-Unis, la crypto a fait une entrée remarquée dans le débat politique, notamment dans les États clés (swing states), grâce à un lobbying actif et à des sondages révélant l’importance croissante de ce sujet pour les électeurs. Joe Biden a ainsi dû répondre aux initiatives pro-crypto de Donald Trump, en participant par exemple à la Bitcoin conférence.
Pour les candidats, adopter une position favorable aux cryptomonnaies permet également de rajeunir leur image et de se positionner sur les enjeux technologiques actuels. L’émission de NFTs (Gaspard Koenig en France) de memecoins à l’effigie d’un parti ou d’un candidat (le coin MAGA avec Trump, le Bidencoin ou, en France, le Zcoin du candidat Zemmour), ou l’acceptation des cryptomonnaies comme moyen de paiement, sont autant de moyens de créer un nouveau lien avec les électeurs, en particulier les plus jeunes.